Arménie 2023 : génocide en cours – l’appel

L’ancien procureur général de la Cour pénale internationale, Luis Moreno Ocampo, a publié un article important qualifiant de « génocide » les actions du dictateur de l’Azerbaïjan, Ilham Aliyev, contre les Arméniens du Haut-Karabagh.

Nous complétons cet appel par l’article très éclairant de Marion Duvauchel, Les guerres du Haut-Karabagh, qui met en lumière le projet turco-islamique d’Erdogan – sur ces questions purement géo-stratégiques, voir Jean-Marie LORGE, Les guerres du haut Karabagh. Le décor et son envers, éd. Baudelaire, 2021, 60 p., 10,5€.
Il convient également de signaler la basse politique du 1er ministre Pashinyan – proche de Soros – qui a en fait abandonné le Haut-Karabakh depuis au moins trois ans. Moscou a clairement indiqué que les déclarations de Pashinyan en octobre 2022, puis en mai 2023, reconnaissaient la suprématie de l’Azerbaïdjan sur le Haut-Karabakh, modifiaient les termes de l’armistice de novembre 2020: Pashinyan a effectivement « vendu » cette terre arménienne le 23 sept. 2023 et la seule aide reçue par la population l’a été par les quelques soldats russes présents en temps que « gardiens de la paix ». De son côté, les USA avaient construit une méga-ambassade à Erevan et s’opposaient à la présence de troupes russes au sud de l’Arménie, pour sécuriser la région revendiquée par la Turquie/Azerbaïdjan. De fait, la Russie a lâché progressivement l’Arménie. Pouvait-il en être autrement ? Mauvais calcul ? En tout cas, d’une politique qui se réduit à des rapports de force et à des calculs, les chrétiens en font toujours les frais.

Pour compléter avec un regard historique, voir cette remarquable vidéo de Marion Duvauchel « Pour comprendre les événements de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan » invitée par Arnaud Dumouch.

Appel des responsables des Églises arméniennes de France

Depuis maintenant 231 jours, l’Azerbaïdjan impose aux 120 000 Arméniens du Haut-Karabakh un implacable blocus qui menace l’existence physique même de cette population qui vit sur ses terres ancestrales depuis des temps immémoriaux. En même temps que leurs ainés, plus de 30 000 enfants connaissent la disette, les entraves à l’éducation, des carences dans les soins, les privations de tout type. La population de la région qui déjà est privée de toutes formes d’énergies sera aussi bientôt privée d’eau.

Un convoi humanitaire de près de 400 tonnes de produits de première nécessité organisé par l’Arménie est bloqué pour le deuxième jour à quelques dizaines de mètres du point de contrôle installé en toute illégalité par l’Azerbaïdjan en contradiction avec le point 5 du Document du 9 novembre 2020 instaurant un cessez-le feu et la fixation des positions respectives des deux armées.

Ce point précise : la République d’Azerbaïdjan garantit la sécurité de la circulation des citoyens, des véhicules et des marchandises dans les deux sens le long du couloir de Lachine. Ce document tripartite engage pourtant l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Russie.
Son 3ème point précise que « Le corridor de Lachine (5 km de large), qui assurera la liaison entre le Haut-Karabagh et l’Arménie, et ne touchera pas la ville de Chouchi Passe sous le contrôle du contingent russe de maintien de la paix ». Par ce document, la Russie se porte donc garant de la continuité et de la permanence – sans entraves – de la circulation des hommes et des biens entre l’Arménie et la Haut-Karabakh.

Or, malgré les ordonnances juridiquement contraignantes de la Cour de justice des Nations Unies du 22 février et du 6 juillet 2023, malgré les déclarations de M. Josep Borrell, le chef de la diplomatie européenne, du Quay d’Orsay et des milieux diplomatiques et politiques de ces dernières heures, Bakou continue de bafouer le Droit International et de provoquer la Communauté internationale.

Dans ces conditions, nous en appelons à la conscience universelle, aux instances internationales et nationales, aux responsables religieux, à la presse et aux media, aux citoyens de notre pays et de l’Union européenne : aidez-nous à briser ce double blocus, celui de l’information, et surtout celui de l’Azerbaïdjan qui n’a d’autre objectif que de mettre en pratique une nouvelle épuration ethnique.

Stepanakert ne doit pas devenir un nouveau Sarajevo !

Nous prions le Seigneur afin qu’Il mette notre peuple à l’écart des multiples dangers qui règnent dans ce monde.


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Les guerres du Haut Karabagh

De Marion Duvauchel :

Les bons livres sont rares, et les ouvrages clairs et concis le sont plus encore. L’opuscule de Jean-Marie Lorgé Les guerres du Haut Karabagh (éditions Baudelaire, 2021) présente ces deux qualités.

Pour comprendre ce conflit tragique, il convient de connaître la vision de l’échiquier international d’Erdogan, telle que l’auteur la décrit. Et nous pouvons lui faire confiance.

Erdogan ancre la Turquie dans deux socles : « Patrie bleue » et « Panturquisme ». La Patrie bleue » est une sorte de patriotisme gazier et pétrolier visant à prendre le contrôle du sud et de l’est de la mer Méditerranée et des ses ressources. Voilà qui devrait mettre l’Europe sur le qui-vive. Le pendant  de cette « Patrie bleue », c’est la réalisation du grand dessein d’Enver Pacha : la coalition des régions turcophones du Bosphore aux monts Altaï, sous le leadership de la Turquie. L’Azerbaïdjan, pays à majorité musulmane, ethniquement, culturellement et linguistiquement le plus proche de la Turquie constitue le deuxième maillon de cette chaîne pontique : de la Turquie à la Kirghizie en passant par l’Azerbaïdjan, la Turkménie, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan.

La première guerre du Haut Karabakh  (1990) l’oppose à l’Azerbaïdjan.

La seconde guerre (2020) voit l’entrée en jeu de la Turquie. Son appui sans faille pour l’Azerbaïdjan s’inscrit dans cette politique d’Ankara. À cela s’ajoute, ce que personne n’ose dire, la haine séculaire de l’islam pour les chrétiens.

En septembre-novembre 2020, l’offensive azerbaïdjanaise « poing d’acier » a pour but immédiat de faire sauter le verrou de Chouchi, de verrouiller le corridor de Latchin (10 km de long) par où passe la seule route qui relie le Karabakh à l’Arménie ; de couper la seconde route reliant deux villes d’Arménie.

Autrement dit, il s’agit d’asphyxier le Nagorno Karabakh.

La défaite, militaire comme politique, a été alors totale. Il ne restait plus à l’Arménie que le choix entre mettre une sourdine à son désir d’occidentalisation et accepter le renforcement de ses relations politiques et militaires avec la Russie, l’Iran, la Chine ou accepter la voie esquissée par Erdogan le 10 décembre 2020 lors du défilé de la Victoire à Bakou » : un statut de vassal au sein d’une coalition régionale dominée par une Turquie ivre de son passé ottoman.

Et ce passé ottoman, nous le connaissons : il va de l’oppression islamique aux massacres et au génocide.

Il restait une troisième voie : recommencer une guerre désespérée. C’est ce qu’on a vu récemment. Avec une nouvelle débâcle.

La deuxième guerre s’inscrivait dans la vision erdoganienne d’un continuum territorial Bosphore/Altaï dont la continuité territoriale Turquie/Azerbaïdjan constituait la première étape. Pour cela il fallait faire sauter le verrou du Nagorno Karabagh. C’est fait.

Il reste encore un verrou : la Siounie, arménienne depuis deux millénaires que les Azéris revendiquent aussi mais en prenant comme point de départ les XIXe et XXe siècles. La prise de la partie centrale et méridionale de la Siounie par la Turquie, par Azerbaïdjan interposé verrait la réalisation de l’objectif politique majeur du panturquisme : une masse turco-azerbaïdjanaise avec trois fenêtres maritimes.

La troisième guerre du Haut Karabagk a bel et bien eu lieu. Mais pas celle à laquelle on pouvait s’attendre.

Cela peut vouloir dire que ce n’est pas fini.

Sur les territoires récupérés par l’Azerbaïdjan aux termes de l’accord du 9 novembre 2020, quelque 80 édifices religieux chrétiens ont été détruits (voir mon article publié sur le site : les Églises albaniennes et la propagande musulmane).

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