Les chrétiens d’Irak et l’avenir

Les chrétiens d’Irak et l’avenir

__ L’analyse faite par Françoise Balitrand à son retour du Kurdistan en janvier 2016 est tellement pertinente – et elle n’a rien perdu de son actualité – que nous la reproduisons telle quelle. EEChO soutient en particulier l’identité des chrétiens d’Orient, parce qu’ils sont menacés plus que jamais et que le trésor de leurs traditions est vital pour l’Eglise universelle. Ce soutien, enraciné dans la redécouverte du christianisme des origines et le partage, aide à vivifier leur culture chrétienne et ses expressions : ceci est capital pour les communautés émigrées en Occident et confrontées à une culture athée agressive et insidieuse, mais parfois aussi à la présence de groupes islamiques militants.

__ L’idéal serait que les chrétiens d’Orient puissent rester chez eux parce que les conditions le permettent, et nous nous sommes engagés en ce sens dès le début. En même temps, la réalité pose d’innombrables défis auxquels les Eglises d’Irak essaient de faire face, en particulier l’Eglise chaldéenne qui est majoritaire et dont Mgr Mirkis, ami de longue date d’EEChO, fait connaître la situation en Occident. Ces défis des chrétiens réfugiés au Kurdistan sont remarquablement bien résumés dans les lignes qui suivent.

L’avion prépare son atterrissage à Erbil. En bas, les camps de réfugiés s’imposent à notre regard en figures géométriques tracées au cordeau. Ils sont partout : dans la ville au pied des grues et des hauts immeubles de verre, aux abords de la ville, à l’extérieur de la ville, loin de la ville. En rangs serrés et parfaitement organisées, des dizaines de milliers de mobil homes abritent ces familles de réfugiés qui ont fui Daesh. Nous atterrissons au Kurdistan irakien, terre d’asile.

Dans l’aérogare aux grandes infrastructures blanches et au sol de granit poli, l’accueil est sobre et efficace. Nous aurons à prendre une navette pour faire les quelques kilomètres qui nous séparent du hall d’accueil. Ceux qui attendent sont à la périphérie, là où les barbelés et les peshmergas protègent cet aéroport international. Pour y arriver, chacun d’eux a subi la fouille et aucun véhicule n’a échappé aux chiens renifleurs. Nous venons de poser nos pieds dans le Kurdistan irakien, terre en guerre.
Erbil, Souleymanieh, Kirkouk : Daesh n’a pu y mettre le pied ; les peshmergas, redoutables combattants kurdes, l’ont arrêté. Après l’annexion rapide de Mossoul, de Qarakosh, des autres villes et villages de la vallée de Ninive, la voie semblait pourtant ouverte aux terroristes islamistes et de nouveaux champs pétroliers étaient à portée de leurs armes prises à l’armée iraquienne en débâcle à Mossoul. Les peshmergas les ont refoulés. Le combat a été très rude et il le reste : les soldats kurdes sont partout, jour et nuit, aux côtés de l’armée et de la police nationales. C’est le prix de la sécurité pour leur population, pour leur terre et leur pétrole, pour Kirkouk situé à leur porte, pour les réfugiés aussi. Ce prix, beaucoup l’ont payé de leur vie : élevés au rang de martyrs par les leurs, leur photo est aux carrefours des villes et aux différents check points qui séparent cette terre kurde du reste de l’Irak.

Devant les hordes de la mort, fuir quoi qu’il en coûte
On savait Daesh en Syrie, on en connaissait ses horreurs mais comment imaginer que ces terroristes entreraient en Irak « comme dans du beurre » ? Ils sont arrivés à Mossoul le 10 juin 2014. Cette ville aux nombreuses églises avait accueilli dès 2006 des chrétiens du sud du pays considérant la plaine de Ninive moins dangereuse : l’attentat dans la cathédrale de Bagdad qui avait fait, à Toussaint 2010, 58 morts dont 2 prêtres, leur avait donné raison. C’était sans imaginer que le mal viendrait d’ailleurs les frapper encore plus fort. Il est pourtant venu, très vite. L’évêque syriaque catholique de Mossoul a alors appelé tous ses fidèles à partir ; les cloches se sont mises à sonner ; les chrétiens ont fui vers Qaraqosh et leurs prêtres ont fermé la marche de cet exode précipité. Daesh leur avait laissé le choix : se convertir, mourir ou partir. Et ils ont choisi : ne pas renier leur foi et donc tout quitter : maisons, commerces, bureaux, officines, écoles, terres, couvents et églises.

Puis ce fut la nuit du 6 au 7 août 2014. L’entrée de Daesh à Qaraqosh, cité chrétienne depuis toujours, initiait un nouvel exode, encore plus à l’Est, vers le Kurdistan irakien. Tous ces chrétiens qui avaient fui les villes du Sud puis la plaine de Ninive se remettaient en route avec ceux de Qaraqosh sans hésiter, une nouvelle fois au nom de leur foi et donc de leur vie. Certains ont fini cette ultime fuite à pied, les femmes serrant les enfants dans leurs bras, les hommes portant les personnes âgées sur leur dos. Ils étaient 120 à 130 000 à partir sans bagage ; et toujours aucun apostat dans leurs rangs. Les quelques rares chrétiens restés en arrière du fait de leur âge ont été ensuite rachetés par les proches aux islamistes. Il n’en a pas été de même pour les yezidis vivant dans des régions plus isolées. Traités « comme du bétail », seuls certains ont pu fuir à temps. Le Patriarche de l’Eglise Chaldéenne,
Louis Raphaël Sako, martèle que l’absence d’apostat et le très faible nombre de morts chez les chrétiens du fait de ces exodes à répétition est le fruit de la prière, la prière des chrétiens d’Irak eux-mêmes s’étant abandonnés à la Providence, mais aussi celle des chrétiens du monde entier. Autre miracle : l’hébergement rapide de ces quelques 130 000 réfugiés chrétiens mais aussi de musulmans et de yezidis ayant réussi à sortir du monde de l’horreur. Ces flots continus d’hommes, de femmes, d’enfants, de vieillards, d’handicapés, de malades ont trouvé peu à peu refuge derrière la ligne de défense des peshmergas, sous des tentes, dans des hangars, des halls, des maisons et des églises à Erbil, à Zakho, à Duhok, et plus au Sud, à Souleymanieh et à Kirkouk.

Quand le pire ouvre la voie au meilleur
Immédiatement, la population, les autorités locales et l’Eglise se sont mobilisées pour assurer le minimum vital aux arrivants : en quelques semaines, les villes de la région autonome du Kurdistan ont accueilli 1,2 million de réfugiés (sur une population kurde d’Irak de quelques 6 millions), et Kirkouk qui dépend du gouvernement central de Bagdad, en a accueilli un demi-million. Sa population est alors passée de 1,5 million d’habitants à 2 millions. Non sans conséquence sur la vie locale : les coupures d’électricité sont fréquentes et longues, l’alimentation en eau difficile du fait d’installations incapables d’absorber un tel afflux de nouveaux arrivants. Pourtant tout a été mis en oeuvre pour réussir cet accueil, avec les moyens du bord avant que n’arrive l’appui financier de l’étranger. A Souleymanieh, durant 14 mois, dans le hall de l’église Saint Joseph de 600 m², 74 familles (350 réfugiés) ont cohabité, séparées par des box aux murs de toile. « Pas un incident dans cette promiscuité et cette rusticité de vie imposées » se félicite Monseigneur Mirkis, archevêque de Kirkouk-Souleymanieh qui porte le souci, y compris financier, de l’accueil des réfugiés sur tout son diocèse. D’autres familles ont été hébergées ailleurs, dans des camps, dans les églises dont la part congrue était réservée aux offices. A Souleymanieh, une église pentecôtiste provisoirement fermée au culte abrite toujours dans sa nef treize familles dont les espaces de vie sont séparés par des bâches multicolores. Une école de 130 élèves jouxte ces logements providentiels : chaque classe a sa discipline et ses enseignants sont majoritairement réfugiés eux aussi.

Contrairement au Liban ou au sud de la Syrie, autres lieux de refuge, la majorité des enfants de réfugiés sont ici scolarisés. Il en est de même des étudiants universitaires : Monseigneur Mirkis accueille à Kirkouk, pour la 2ème année, tous ceux qui, de langue arabe, veulent poursuivre leurs études à l’université car pour eux, la langue kurde est un obstacle à leur formation dans la région du Kurdistan. Actuellement au nombre de 385, ils logent par groupe de 30 à 35 dans des maisons louées par l’archevêché qu’il a fallu équiper en sanitaires et en literie. Pas de limite à cet accueil : tout nouvel étudiant est pris en charge chaque fois que sa motivation et le manque de moyens financiers familiaux le justifient. Dans ces maisons où le climat est à l’entraide, il n’y manque rien malgré les conditions de vie plus que spartiates : dans chaque pièce devenue dortoir, chacun à sa valise pour armoire et son lit pour table de travail. Peu importe, l’ambiance est aux études. Majoritairement chrétiens, ils sont aussi yezidis, musulmans, shabaks ou mandéens. Ils savent que leur avenir comme celui de leur pays se prépare ici aussi : futurs architectes, ingénieurs, professeurs, médecins, pharmaciens, dentistes, … ils travaillent dur. Comme en 2015, ils veulent cette année aussi offrir à leurs protecteurs le plus beau des cadeaux : 100 % de réussite à leurs examens.

Pour Monseigneur Mirkis, pas un enfant ne doit être privé de scolarité, pas un jeune d’université, pas un réfugié de soins. Avec la générosité de pays occidentaux et notamment de la France par des associations telle « L’OEuvre d’Orient » ou « Fraternité en Irak », ce défi est chaque jour gagné malgré le coût de la vie élevé : nourrir les réfugiés chrétiens sans revenus de la seule ville de Kirkouk coûte 12 000 € par mois auquel il faut ajouter 4000 € pour le seul lait destiné aux plus jeunes ; même situation à Souleymanieh et dans le Nord. Chaque journée d’étudiant revient de 8 à 10 € par jour soit 1,2 million par an car il faut loger, chauffer, nourrir, soigner, assurer les accès Internet pour se former et le transport vers les universités pour des raisons de sécurité car nous sommes à « Kirkouk, zone
fortement déconseillée » par les diplomaties occidentales. Derrière l’évêché, l’école primaire Mariamana agrandie grâce à l’appui de l’association « Fraternité en Irak » accueille 150 jeunes enfants qui, comme leurs enseignants, sont chrétiens ou musulmans. En 2015, cette école a été classée meilleure école de Kirkouk. Dirigée par soeur Madeleine, dominicaine réfugiée de Qaraqosh, on y enseigne aussi la religion, ce qui conduit à séparer les élèves quand les chrétiens suivent la catéchèse et apprennent le syriaque pendant que leurs camarades musulmans, de l’autre côté du couloir, étudient le Coran.

Ce modèle d’école privée, on le retrouve dans l’enseignement primaire et secondaire depuis que l’Eglise a pu reprendre ses établissements qui avaient été confisqués et nationalisés par Saddam Hussein. Elèves parfois en uniforme, souvenir de la présence britannique, comme professeurs, ils sont chrétiens et musulmans emmitouflés dans leurs vêtements d’hiver car, faute de moyens, le chauffage fonctionne peu dans les grandes classes. Mais la cour de récréation permet à chacun de réchauffer les corps et les coeurs, et cela suffit.

A côté de la prise en charge des besoins quotidiens (hébergement, nourriture, transport), de l’éducation et de la formation des jeunes, il y a les soins aux malades, aux handicapés, aux personnes âgées. Là aussi, à Kirkouk comme à Souleymanieh, deux dispensaires ont été créés par le diocèse et sont pilotés bénévolement par Dina, biologiste. L’ouverture, le vendredi, permet aux médecins, musulmans pour la plupart et bénévoles eux aussi, de soigner ceux qui sont sans ressources, refugiés ou pas, chrétiens ou musulmans. A l’épreuve du pire, le coeur se dilate. La compétence comme l’équipement ne fait pas défaut. La générosité non plus. Nous ne sommes pas dans la « Jungle » de Calais. Nous sommes en Irak, là où les réfugiés, dans leur grande majorité, souhaitent rester.
Dans tout le Nord du Kurdistan irakien, la vie s’est aussi organisée. A l’est d’Erbil par exemple, dans un camp d’Ankawa qui compte 1200 familles, les réfugiés ont ouvert boulangerie, magasins d’alimentation et de vêtements. L’activité reprend notamment dans le bâtiment et procure un peu de travail. Les emplois sont certes trop peu nombreux mais l’objectif de la majorité des réfugiés est autre : ne pas rester durablement ici mais partir.

Quel avenir après Daesh ?
Partir. Où ? Daesh contrôle encore les provinces voisines. Dans ce pays qui est le leur, le passé a été douloureux, le présent est difficile et l’avenir très incertain. Chez les réfugiés pour qui l’Eglise fait tout pour éviter l’isolement, l’entraide est là et la foi porte toute la communauté chrétienne comme chaque individu. « Pour vivre, nous avons besoin de Dieu et d’une église » nous dit Zeena, bientôt ingénieur en génie civil. Mais le climat reste lourd malgré les éclats de rire des enfants et leurs espiègleries. Chaque famille s’interroge sur son avenir même si chacun est persuadé que Daesh finira « comme s’est éteinte la dictature en Europe ». Reconstruire le pays ne leur fait pas peur d’autant que l’Irak est riche : l’eau comme le pétrole attendent sous leurs pieds et, dans les déserts, les minéraux enviés ne sont pas encore exploités. Pour le moment, leur combat, c’est celui contre l’oisiveté et le découragement ; ils doivent rester à la fois patients et confiants. Ce combat est plus dur pour les hommes que pour les femmes qui ont la charge du logement, des repas et des enfants. Au carrefour des allées des camps, ces hommes se rassemblent en petits groupes comme s’ils attendaient le bus qui va les conduire au travail et… qui ne passera pas. Garder espoir, oui mais aussi rester en famille.

En Orient, la famille est existentielle, et elle est grande car elle regroupe les aïeux comme les collatéraux et descendants au plus loin que la mémoire puisse remonter : les visites sont quotidiennes, on a besoin de se voir, de parler, de partager un repas, de prier, de pleurer ensemble. Les enfants partis au loin ? C’est une blessure inguérissable dans le coeur de ceux qui restent comme chez ceux qui se sont éloignés, et Skype n’y peut rien. Chez nous, en Occident, on est heureux que l’enfant diplômé débute sa carrière à l’autre bout du monde : il part dans un nouveau pays, il y réussira et il reviendra un jour pour toujours. En Orient, c’est une autre histoire, à l’opposé de celle-ci : l’enfant part dans un pays qui n’est pas nouveau : il lui est étranger ; on sait que pour lui, ce sera très dur, peut-être trop dur ; on sait aussi qu’il ne reviendra jamais. Ce déchirement est culturel. Or la culture enracine et rassemble quand elle est une, oppose et divise quand elle est multiple. L’Occident qui aspire ces réfugiés par ignorance ou générosité ne l’a pas encore compris. Il en fait déjà les frais.

Rester ou partir ? L’Allemagne, le Canada, l’Australie, certains y pensent, quelques-uns y partent. Mais beaucoup sont à l’étape première de leur route en Jordanie, au Liban, en Turquie entassés dans des camps et des hot spots dans des conditions préoccupantes, voir dramatiques. Rester ou partir : on lit ces deux mots dans les yeux inquiets des jeunes parents qui regardent leurs enfants, dans les yeux des étudiants qui, sur leur smart phone, ont vu l’accueil généreux de quelques proches par des familles ou paroisses françaises. En réalité, leur vraie question est autre : qui viendra à la tête de l’Irak après Daesh ? C’est sur ce point que se pose leur inquiétude car la vie est très dure sur cette terre par la faute de l’homme, et cela depuis longtemps.

Après l’embargo privant de tout la population meurtrie, les Américains ont organisé l’après Saddam Hussein en 2003, ouvrant les prisons pour libérer les prisonniers politiques comme les assassins, supprimant l’armée et la police. Le résultat ne s’est pas fait attendre : les milices et les gangs se sont répandus dans tout le pays. Enlèvements, meurtres, demande de rançon, séquestrations, attentats : la peur était partout et ce déchainement meurtrier a préparé le terreau d’accueil de Daesh. Après la guerre Irak-Iran qui, de 1980 à 1988, avait fait près d’un million de morts, puis celle contre le Koweit en 1990-1991, l’élimination du dictateur Saddam Hussein et tous les désordres collatéraux qui ont suivi, on comprend que cet exode massif pour fuir Daesh vers le reste du monde et, en particulier, vers l’Europe peut être la tentation.Partir ? Rester ? Dans le regard sage des plus âgés, dans celui, déterminé, d’adultes et de jeunes, il y a encore l’espoir de redresser le pays dès qu’il sera libéré. C’est l’Histoire même de l’Irak qui recommence : tous les chrétiens vivent dans le souvenir de leurs martyrs priés chaque jour à la messe ; leur pays traversé par les routes de la soie, des épices et de l’encens a été aussi une terre d’invasion, les Ottomans et bien avant, les Perses, étant toujours dans les mémoires.

Aujourd’hui, tous les réfugiés chrétiens sont en sécurité en territoire kurde et à Kirkouk. Ils ont un toit même si à Erbil 2700 familles vivent encore de façon précaire dans des baraques de chantier. Ils ne souffrent ni du froid, ni de la faim et leurs enfants sont scolarisés. Quand Daesh sera parti, tous les chrétiens d’Irak réfugiés ici et ailleurs peuvent revenir chez eux. Leur place est là-bas. Ils y sont depuis la première heure : l’Eglise chaldéenne dont la plupart font partie est celle du premier siècle, donc celle des premiers chrétiens. L’Orient est leur terre ; ils en ont besoin comme l’Orient a besoin d’eux. Un haut dignitaire musulman de Kirkouk ne dit rien d’autre quand il déclare « Les chrétiens sont des fleurs qui sentent bon » ; d’autres expliquent combien il faut aider les chrétiens à rester car « c’est important pour l’Irak » ; et cette directrice d’école d’affirmer que dans la relation à l’autre, quel qu’il soit, c’est toujours le chrétien qui fait le premier pas.

Ecoutons les Orientaux pour savoir que faire pour l’Orient
« Ne nous oubliez pas », « Aidez-nous à garder les chrétiens chez nous » implore l’Eglise d’Irak comme les autorités civiles visionnaires. Il y avait 1,5 million de chrétiens en Irak en 2003 ; il y en a entre 300 et 400 000 aujourd’hui. Ils ont fui le désordre de l’avant Daesh et maintenant ils fuient Daesh en espérant trouver mieux ailleurs, espoir entretenu par le calcul politique, l’intérêt économique ou l’ignorance des pays occidentaux. Cette hémorragie épuise l’Orient sans apporter de vie nouvelle en terre d’accueil. Pourtant la paix revenue, l’Irak et la Syrie, ces terres de civilisation et de culture, ont les moyens de faire vivre tous les leurs, y compris ceux que la guerre a chassés au loin.
Les chrétiens en Orient, c’est la preuve quotidienne que la cohabitation avec d’autres peut être vécue. Si cette cohabitation n’est désormais plus possible là où la culture est commune, comment le sera-t-elle en Occident où la culture est si différente ? Oui, qui sommes-nous pour déraciner les chrétiens d’Orient ? Nous, c’est-à-dire les responsables politiques occidentaux qui se sont réveillés bien tard pour anéantir Daesh. Nous, c’est-à-dire chacun de nous qui doit oeuvrer pour que les chrétiens d’Orient, nos sentinelles de la paix, restent ou reviennent chez eux.

Ecoutons cette Eglise d’Orient par la voix de Monseigneur Mirkis venu en France en novembre 2014 nous dire : « L’éradication des chrétiens et des minorités perpétrée par l’État islamique en Irak engage le monde entier. Ce génocide, qui est en particulier celui des chrétiens et des minorités irakiennes, veut être plus généralement celui de tout ce qui n’entre pas dans le projet totalitaire de l’État islamique, notamment de tout ce qui touche de près ou de loin à l’Occident. Si l’Europe veut continuer à jouir de la paix, il lui incombe d’agir sans attendre, de la même manière que les États-Unis décidèrent de s’engager aux côtés de leurs alliés dans la Seconde Guerre mondiale. La solution ne consiste pas dans la fuite des chrétiens et des minorités d’Irak. La paix est encore possible en Irak tout comme elle l’est aussi en France, en Europe et dans le reste du monde. Dans le contexte qui est aujourd’hui le nôtre, l’une ne se fera pas sans l’autre ».

Cet avertissement était prémonitoire. Un an après, il y a eu à Paris le 13 novembre et le sang versé par 130 enfants de notre République. Cela suffira-t-il à convaincre chacun d’écouter ceux qui vivent là-bas et ont l’autorité pour nous dire ce qu’il faut faire ici pour eux. « Aidez-nous à garder les chrétiens chez nous », voilà le message que nous avons le devoir d’entendre et de soutenir.

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One thought on “Les chrétiens d’Irak et l’avenir

  • 2 avril 2016 at 13 h 19 min
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    Les chrétiens d’Orient ont non seulement le droit mais le devoir de rester sur leurs terres qu’ils occupaient bien arrivant l’arrivée des arabes et de l’islam : ils sont chez eu en Irak et partir c’est donner la victoire et la joie du triomphe aux islamistes.

    Les chrétiens d’Orient ont non seulement le droit mais le devoir de défendre leur identité araméenne et de refuser d’être des arabes : ils n’ont pas à être arabisés de force et soumis, humiliés et ont le droit de revendiquer leur identité culturelle, leurs droits et leurs autonomie politique dans le cadre d’un Irak ou d’une Syrie fédéralisés.

    Les chrétiens d’Orient ont non seulement le droit mais le devoir de se défendre : la guerre juste et la légitime défense sont des concepts chrétiens, face à Daech ou qui que ce soit ; au Liban, seule la constitution de milices chrétiennes a permis la non disparition des chrétiens. L’islamisme ne respecte que la force.

    Certes, l’Occident a un certain confort et il peut sembler facile de parler ainsi ; mais l’Occident n’a pu l’obtenir sa liberté et sa sécurité qu’au prix de luttes courageuses très dures : par exemple, si les Français ou les Russes avaient migré en masse face aux nazis, le triomphe d’Hitler aurait été totale : mais la résistance passive et active avec le soutien d’autres pays ont permis de chasser la barbarie. Contre la barbarie de Daech ou d’autres islamistes, il convient de faire de même.

    Les chrétiens doivent cesser d’être divisés ; c’est par la division des chrétiens que l’islamisme s’est imposé en Orient.

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